Mise à jour de l’analyse commune pays du Niger
RESUME EXECUTIF
La mise à jour de l’Analyse Commune Pays (ACP) du Niger intervient dans un contexte politique difficile avec le changement anticonstitutionnel intervenu le 26 Juillet 2023 et l’annonce de la prise de pouvoir par le Conseil National pour la Sauvegarde de la Patrie (CNSP). Contrairement à la précédente ACP qui a été élaborée après des consultations profondes avec des institutions internationales et nationales, y compris différents ministères et institutions étatiques, les Organisations de la société civile (OSC), cette mise à jour s’est faite sous la supervision de l’équipe du Bureau de la Coordination des Nations Unies au Niger, avec les points focaux des différentes agences—résidentes et non-résidentes—des Nations Unies au Niger et en étroite collaboration avec l’équipe de la gestion des programmes ou Programme Management Team (PMT).
Pour rappel, l’ACP est un exercice obligatoire et essentiel qui a pour objet de « procéder à l’examen de la situation politique, économique, sociale, humanitaire et environnementale du pays, et d’apprécier les progrès enregistrés dans la mise en œuvre de l’agenda 2030 notamment les progrès accomplis vers l’atteinte des Objectifs de développement durable (ODD), particulièrement en ce qui concerne les femmes, les filles et les groupes les plus vulnérables en application du principe « Ne laisser personne de côté ». Utilisant l’approche NEXUS, la mise à jour a mis en exergue les problèmes émergents et leurs différentes causes, les défis et opportunités du Niger depuis l’élaboration du précédent.
Aux termes de cet exercice inclusif et participatif, les points saillants suivants sont à noter :
Sur le plan macroéconomique, il est envisagé un ralentissement de la croissance économique est prévu avec un taux de croissance estimé à 4,1% en 2023 contre 6,9% avant le coup d’État. Ce qui aura des impacts sur la prise en charge des besoins primaires des populations mais également celle des dépenses sécuritaires.
En outre, avec la baisse significative de ses recettes fiscales et non-fiscales, le Niger risque de faire face à d’autres défauts de paiements dans le futur si la crise perdure. En prévision de ces risques d’insolvabilité financière du pays, l’agence de notation Moody’s a dégradé la note du Niger de Ba à Caa. Du fait des sanctions, le Niger n’a plus accès au marché boursier de l’UEMOA pour financer une partie de son budget par la dette et une fois les sanctions levées, le pays empruntera à des taux d’intérêt plus élevés.
Relativement à la situation politique, le CNSP continue de consolider son pouvoir à travers la mobilisation populaire, le renforcement du partenariat avec des pays alignés politiquement, la reconnaissance progressive de son autorité par des partenaires traditionnels, la suspension d’institutions nationales, la création de nouvelles structures dépendantes du CNSP, des nominations à des postes clefs et, la suspension sine die de l’exercice des droits politiques. Un dialogue national annoncé en août 2023 est attendu pour fixer la durée de la transition politique ainsi que les orientations qui seront intégrées au Programme de Résilience pour la Sauvegarde de la Patrie (PRSP).
S’agissant du volet gouvernance, paix et sécurité, le processus de la décentralisation est relativement avancé au Niger en dépit de la faiblesse des capacités techniques et institutionnelles et de l’insuffisance de ressources financières et humaines au niveau local. L’adhésion de l’association des régions et des municipalités au CNSP a permis de préserver ces deux niveaux de représentations locales. A l’inverse, les gouverneurs des régions et les préfets des départements ont tous été remplacés par des personnels militaires dans la foulée des évènements de juillet.
Depuis juillet, les activités politiques sont suspendues sur toute l’étendue du territoire bridant ainsi l’expression des droits individuels et collectifs, tandis qu’en raison de l’insécurité, l’état d’urgence demeure dans plusieurs départements de Tillaberi et Diffa. En outre, l’abrogation récente de la loi 2015-36 du 26 mai 2015 relative au trafic de migrants au Niger pourrait engendrer une recrudescence du trafic de migrants et occasionner davantage de vulnérabilités pour cers derniers.
S’agissant du volet développement ou capital humain du NEXUS, il faut noter :
- Pour l’éducation, la fermeture de plusieurs écoles du fait de la dégradation de la situation sécuritaire ces dernières années dans certaines zones du pays, notamment Tillabéry. En plus, le système éducatif nigérien est confronté à des défis infrastructurel et démographique qui risquent d’être exacerbés par la situation de crise politico-militaire dans laquelle se trouve le pays.
- Concernant la santé, en dépit des progrès notables réalisés ces dix dernières années, le système sanitaire nigérien continue d’être confronté à plusieurs défis, y compris l’accès aux soins de qualité, la persistance des maladies transmissibles et non transmissibles, la persistance des maladies à potentiel épidémique, la faiblesse de la couverture en assurance maladie et le défaut du financement du secteur. La crise politique actuelle est venue exacerber les problèmes existants avec la pénurie de médicaments due aux sanctions économiques et commerciales imposées par la CEDEAO.
- S’agissant du volet humanitaire, le Niger continue d’être confronté à plusieurs urgences humanitaires qui défient les capacités de réponse de l’État. L’insécurité dans certaines zones du pays, couplée à l’instabilité croissante dans les pays voisins entrainent un afflux de réfugiés et de déplacés internes. En outre, la crise politique et les sanctions économiques et commerciales ont eu des impacts néfastes sur la sécurité alimentaire et nutritionnelle ainsi que la situation des droits de l’homme et le genre.
Face à cela, une analyse des scénarii de sortie de crise a été faite dans le but de mieux préparer l’Equipe pays aux différentes éventualités et lui permettre d’anticiper dans sa planification stratégique pour l’année 2024 aux fins de continuer à poursuivre ses efforts envers la population nigérienne et à contribuer au renforcement du leadership des Nations Unies dans la région du Sahel. À la suite de cette analyse, le scénario le plus probable dégagé est celui d’une transition avec une reconnaissance du CNSP.